lundi 24 juin 2024

Synthèse 666 et Enuma Elis

Mon intérêt pour ce sujet porte sur l'origine de notre système de mesure du temps et des angles, le système numérique sexagésimal mésopotamien.

Cette représentation du temps et de l'espace est mise en œuvre dans un texte mésopotamien majeur du 12ème siècle avant notre ère, l'Enuma Eliš ou en Français Epopée de la création.

Après avoir mis à mort la matrice Tiamat, les eaux salées (la mer), le roi des dieux, la réduisant à l'état de lieux, la sépare en 2, terre KI et ciel AN  et organise l'année solaire MU en 12 mois de 30 jours régulés en 4 phases lunaires. Ces mouvements astraux dont les savants observaient les levers à l'est établissent le lien entre les 360 jours de l'année, le temps et le cercle du ciel, l'espace: au jour U4 correspond le degré.

Plus discrètement dans ce texte apparaissent les 4 points cardinaux  , les vents du sud, du nord, de l'est et de l'ouest.

La version de l'Enuma Eliš publiée par J.Bottéro et S.N. Kramer aux Editions Gallimard dans le recueil de textes mythologiques "Lorsque les dieux faisaient l'homme" présente une structure très particulière.

Ce texte est construit en base 60, comportant un nombre rond de vers en base 60:

36x60 vers regroupés par 2 en 18x60 lignes réparties sur 7 tablettes en 2 groupes:
Les 3 premières tablettes et les 4 suivantes comptent 450 et 630 lignes , soit  900 et 1260 vers, en base 60, 15x60 et 21x60 vers.

Tout cela prend sens dans les jeux d'écriture du cunéiforme et de sa base 60, système numérique se substituant dans l'antiquité à nos chiffres décimaux avec leurs virgules.

Mais ce texte va beaucoup plus loin que ce simple découpage en 360 parts. En l 'apprenant le savant apprend les bases du système numérique ainsi que des règles mathématiques élémentaire nécessaires au développement social du pays de l'agriculture aux grands travaux d'aménagements du territoire, canaux d'irrigations et constructions:

  • calcul en base sexagésimale
  • théorème de Pythagore
  • Calcul des racines carrées
  • équivalent des règles de dédoublement des sinus et cosinus
  • calcul du cosinus de 36° ( la moitié du nombre d'Or)

Le sens "créer" de l'idéogramme DU3 venant de son pictogramme en forme de triangle, l'idée m'est venue d'appliquer le théorème de Pythagore à l'organisation des vers du texte:
(15x60)² + (21x60)² = 666 x 3600 , résultat surprenant, d'autant plus que 3600 correspond à l'idéogramme SAR2 au sens de totalité, soit le carré de la base 60x60, l'univers ici.

Dans la version TOB de la bible 666 est cité dans:
  • l'apocalypse, les commentaires indiquent qu'il s'agit d'une métaphore désignant Babylone, capitale religieuse des mésopotamiens
  • dans le livre des rois, caractérisé par la description en base sexagésimale mésopotamienne (base 60) du temple de Salomon.
L'Enuma Eliš, la genèse mésopotamienne, est liée culturellement à la ville de Babylone, le récit décrit la création de la ville et de sa célèbre tour, l'Etemenanki (maison fondement du ciel et de la terre). Le premier idéogramme du texte E est également une dénomination de la ville E ki, signifiant par jeux idéographique la cité des temples.

Il est difficile d'imaginer qu'il n'y a pas là l'explication de l'origine de ce nombre biblique et que la reconstruction du texte à partir de dizaines de fragments soit fausse.
En dessinant ce nombre comme ce qu'il est, un carré de l'hypoténuse , l'explication devient évidente, il désigne la figure de base du raisonnement trigonométrique en base 60.

Le système numérique sexagésimal mésopotamien

Inventé au 4ème millénaire par les sumériens il évolua pour devenir un véritable système de calcul positionnel en base 60, comme l'indique ses unités:

GIŠ 60, 1 clou vertical, désigne l'unité qui peut être n'importe quel puissance de 60: 1;60;3600;216000...
Minu, le nombre vient du sumérien MIN, 2 qui comme une sorte de générique  peut désigner tout nombre. A noter que le ciel AN est phonétiquement  le suffixe du duel, forme du pluriel des objets allant par 2 (inan, IGI AN, les 2 yeux). A noter également que si le chiffre est représenté par 2 clous verticaux, le zéro mésopotamien d'utilisation occasionnelle est représenté par 2 marques en biais.
SAR 2: 3600 désigne la totalité mais s'écrit donc 1dans ce système abstrait.

De 1 à 60, le calcul se fait en base 10 mais à 60 on repasse à 1 comme dans notre système d'heures, minutes, secondes.

216 s'écrit 3;36 pour 3x60+36
2160 s'écrit 36 pour 36x60, l'unité d'ordre 60 n'étant pas écrite.

En créant les dieux on crée également le ciel, le même idéogramme AN/DINGIR désigne les 2.

L'anthropomorphisme religieux qui calque la société divine sur celle des hommes avec 600 dieux IGIGI dirigés par 7 dieux des destins avec à leur tête un roi s'étend à la communauté divine:

  • IGIGI s'écrit 5;60;60 soit 5x(60+60) donc 300 dieux en bas et 300 au ciel
  • les 7 dieux des destins (NAM)sont appelés DINGIR IMIN les dieux 7
  • Marduk le roi des dieux est le dieu 10
  • une tablette décline les appellations numériques divines de 12 dieux: en premier lieu les 7 dieux des destins qui déclinent les sous-unités de la base 60: 60+50+40+30+20+6+10 =216 puis 5 dieux IGIGI 50;10 et 10;15;14=99 soit au total 315=15x21. Ces nombres ne sont donc pas assimilés aux dieux mais en établissent des rapports: ainsi dans l'Enuma Eliš, Marduk le dieu 10 est glorifié dans la septième tablette en recevant de ses pairs les 40 noms d'Ea son père le dieu 40. Avec 50 noms il reçoit la place de son prédécesseur ENLIL le dieu 50.
Le système numérique abstrait est appliqué dans un système de mesure dont le déterminatif cunéiforme est l'IKU surface carré de 120 coudées de côté soit 14400 coudées² ou 4x3600
La longueur de son côté, est le ES , eblu signifiant corde.
Ce carré 4 est celui dans lequel s'inscrit le cercle trigonométrique de rayon 1.
La corde est donc celle d'un arc de rayon √2 (1,4142135...) dont l'approximation en base 60 est 21/15=1,4. En trigonométrie il s'agit de la sécante, l'inverse du cosinus 1/√2.
Or le signe AN/DINGIR est le plus souvent dérivé d'une étoile à 8 branches parfois représenté par un polygone . Dans l'IKU sa surface est donc approximativement 42/15  ou 2x21/15 pour l'octogone inclus dans le cercle trigonométrique.
Dans le texte:
  • l'IKU est désigné par le premier idéogramme E au sens  homophone Iku désignant un terrain entouré d'une digue. Sa surface correspond aux 6 premières tablettes, ce qu'indique la variation du nombre de lignes MU:
    En sumérien MU signifie par homonymie: nom, mot, ligne de texte, année
        

    T1 162 MU

    -12

    450 lignes de textes

     12x12 x 10x10 = 120²= 1 IKU

     

    IKU

    918 MU ou 1836 vers= 36² x 17/12

     

    17/12 = voir algorithme des racines carrées Ö2

    450 MU

    T2 150 MU

    -12

    T3 138 MU

    (+8)

    T4 146 MU

    +10

    18 lignes(montée sur l’estrade royale)

    +450 lignes de texte

    630 MU

     

     

    630/450=21/15 Ö2

     

    21/15 x 10/7 = 2

    T5 156 MU

    +10

    T6 166 MU

    (-4)

    T7 162 MU

     

     

    Glorification par 40+2 MU

    42/60=7/10


  • L'IKU est égale à 100 SAR1, surface de 12 coudées². SAR1 signifie aussi écriture. D'où un second sens , l'IKU c'est écrire les ME qui est la grande métaphore cunéiforme du texte.
    En babylonien Mu, Me signifie "eaux" (Nominatif, Forme construite) qui sont  la matrice Tamat et le progéniteur Apsu  (eaux salées et douces =mer et nappe phréatique). Mise à mort ces prodivinités deviennent des lieux tout comme la fonction du mot "eau" en sumérien qui est la particule post-posée indiquant le locatif (complément de lieu).
    En sumérien Mu renvoie à MU aux sens de mot, nom, ligne de texte, année.
    Me renvoie  au sumérien ME, la centaine et la fonction. Les ME sont un concept mythologique important désignant les valeurs de la civilisation bonnes et mauvaises au nombre de 100(justice, art de l'écriture , colère...). C'est là probablement que se trouve la dimension spirituelle du texte. Avec les 50 noms MU de la glorification et le dédoublement des MU lignes de texte on arrive à 100...les eaux réduites à l'état de lieux, à l'image des lagunes mélant eaux douces et salées, où poussent les roseaux GI, désignant également le calame GI de l'écriture SAR1 sur la tablette DUB des destins.
  • Le BUR est une surface de 18 IKU. Son idéogramme est le signe 10, un coin court et appellation numérique du roi Marduk. Ce de dernier nom écrit AMAR-UTU renvoie  à Buru traduction de AMAR, "petit d'animal". Les 18 MU lignes de texte placées au centre des 450+18+450 lignes de textes de l'IKU de T1 à T6 , on forme le nom de Marduk, décrit "enfant du soleil" littéralement AMA-UTU. Le signe UTU est le chiffre 21, signifie aussi U4 le jour.
Pas de sinus /cosinus du cercle trigonométrique, mais le texte met en scène ses équivalents, l'arc du roi, Gis-Ban qui trouve écho dans Banu "créer" , ES la corde (double du sinus), la flèche TI, la vie en sumérien représente la sécante, l'inverse du cosinus.

Le dernier idéogramme du texte est TI la vie, dans le mot SAR1-RU-TI = royauté au génitif , au sens sens ici de "l'écriture donne la vie"

Construction en 7 tablettes




Selon le manuel d'épigraphie akkadienne de R.Labat, 3600 est l'idéogramme SAR2, signifiant AN-KI, ciel et terre, l'univers.
L'origine de la métaphore ne peut faire de doute, l'importance culturelle du texte déclamée au pied de la ziggourat de la ville, l'E-temen-an-ki ou tour de Babel, pendant un millénaire, explique sa renommée. 

Plus tard je m'aperçus que 666 était un jeu de lecture idéographique du signe IGI/LIM (œil aux sens polysémique voir, face, début, comprendre, 1000)
Sa valeur de nombre 1000 LIM étant un jeu d'écriture avec 100 ME, LIM = 10 x 100.


Le premier point vous sera facile à vérifier, en ayant quelques notions sur la base 60(cf l'Histoire universelle des chiffre de G Ifrah), ainsi que quelques souvenirs du théorème de Pythagore.
Dans une plaquette de présentation d'une exposition sur l'écriture cunéiforme mésopotamienne j'avais lu que le signe "créer""batir" DU3 dérivait du dessin d'un triangle rectangle , support géométrique de tout construction.
En lisant  la genèse mésopotamienne , l'Enuma Elis (Mythologie mésopotamienne de J Bottéro et SN Kramer) je remarquai la mise en forme particulière du texte de 7 tablettes en base 60.
Ses 18x60 lignes , 1080, chacune découpée en 2 vers, soient 2160 vers, étaient répartis en 2 groupes au nombre rond:
  • 15x60 vers dans les 3 premières tablettes
  • 21x60 vers dans les 4 suivantes
Me souvenant du théorème de Pythagore appris à l'école secondaire et du triangle rectangle élémentaire 3-4-5 (3²+4²=5²), j'ai eu la curiosité de l'appliquer au texte, appelé en français Epopée de la Création.
(15x60)² + (21x60)² = 666 x 3600 carré de l'hypoténuse du triangle rectangle de cotés 15 et 21
L'association de ce texte déclamé pendant un millénaire lors de fête du nouvel an , l'Akitu, à Babylone, explique la métaphore biblique, à l'évidence . Difficile de croire à une coïncidence et c'est loin d'être la seule particularité numérique remarquable du texte.


J'ai depuis creusé la question, avec l'écriture cunéiforme elle-même et les connaissances mathématiques de l'époque pour comprendre pourquoi 666 et pas un autre carré de l'hypoténuse.
L'explication réside dans la représentation géométrique de ce nombre en base 60 qui en fait une sorte de condensé de trigonométrie.
En raisonnement mathématique abstrait, c'est à dire en base 60 pure j'en tire:
  • la démonstration graphique du théorème de Pythagore, qui appliquée dans le système de mesure des surfaces l'IKU, s'exprime sous la forme: 1+2=3 (V1 + V2 = V3,   V pour le symbole racine carrée)
  • un mode de calcul des racines carrées, exprimé à partir du nombre 2. Nombre en babylonien se dit minu, du sumérien MIN, 2, le premier nombre. l'unité GIS ou 60 désignant l'objet par jeu idéographique et  3600, SAR2 le ciel et la terre AN-KI)
  • une méthode de calcul du cosinus 36° ( pas de cosinus à cette époque, la métaphore du texte est l'arc de Marduk, sa corde ES et sa flèche TI), nécessaire au découpage du premier cycle de cette genèse selon l'appellation numérique du nouveau roi des dieux Marduk.
J Bottéro explique que ce texte fait référence à un système d'appellation numérique (7 dieux des destins et 5 des 600 Igigi) qui s'explique de la même façon. La mise en forme de la liste représente l'déogramme AN/DINGIR.tel qu'on peut le voir dans le manuel d'épigraphie akkadienne de R Labat. Le texte lui forme le nom du dieu Marduk écrit AMAR-UTU.

Comme vous pouvez le constater cet article pour être clair va nécessiter pas mal d'explications et de représentations graphiques, géométriques et  cunéiformes.
Si vous êtes intéressé je suis tout disponible pour  échanger,  que vous puissiez faire aussi quelques vérifications, le niveau mathématique est du niveau secondaire. Il s'agit d'un travail personnel, je n'ai  pas de référent ni mathématicien ni assyriologue, je suis médecin.